Quand Ana, une Croate de 16 ans, annonce à ses parents qu’elle a une petite amie, ils décident de l’interner dans un hôpital psychiatrique. Elle est alors forcée de subir un traitement pour lutter contre sa « dépendance à la drogue », un diagnostic établi par le Dr. Mirjana Vulinova qui vise en fait à la « guérir » de son homosexualité.

Bolesno est un documentaire rare et poignant. Il alterne les phases de récit pendant lesquelles Ana Dragicevic raconte l’isolement, la torture et les « traitements » qu’elle a reçus « pour son bien », et les séquences où on la voit dans son quotidien actuel. Le film la suit pendant plus d’un an, jusqu’à son combat pour que la docteure responsable de l’hôpital et ses parents soient incarcérés. L’histoire bouleversante d’une jeune femme qui réapprend à vivre au côté de sa compagne et future épouse, Martina, seule personne qui l’aide aujourd’hui à survivre après le flot discontinu de haine dans lequel elle a baigné pendant cinq ans. Pointant de façon cruciale, les cures de déshomosexualisation et leurs conséquences, « Bolesno » fait figure d’œuvre précurseuse. Sujet pour le moment peu traité au cinéma, le témoignage d’Ana Dragicevic, servi par une mise en image sensible et inspirée de Hrvoje Mabic, permet de mettre en lumière les « thérapies de conversion », ou « thérapies de réorientation sexuelle ». Pratiquées depuis le XIXe siècle (électrochocs, médicaments, viols), elles sont prônées actuellement par des organisations religieuses qui y rajoutent la prière, depuis 1973 au sein de mouvements ex-gay (ex-homosexuel). Les résultats désastreux de ces thérapies et les scandales successifs en font aujourd’hui les cibles privilégiées des militants. Ici, grâce à Ana Dragicevic, nous pouvons en mesurer les ravages.

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